Colloque international organisé par
le laboratoire ICAR (UMR 5191), l'université Lumière Lyon II en collaboration avec le CNRS, l'ENS Lyon, l'INRP, l'IUFM-Université Lyon 1 et la Région Rhône-Alpesdu 24 au 26 juin 2010
Problématisation
Les contextes de transmission de savoirs se diversifient et se complexifient pour plusieurs raisons : des besoins incessants de formation dans une société fondée sur l’économie de la connaissance ; des politiques publiques parfois contradictoires visant une certaine libéralisation du secteur éducatif et prescrivant dans le même temps toujours plus l’action éducative ; une hétérogénéité linguistique, culturelle et sociale des publics apprenants ; un usage toujours renouvelé des technologies numériques, etc. De même, cette hétérogénéité et cette complexité sociales s’inscrivent dans des logiques et des finalités d’action individuelles et collectives plurielles (Lahire, 2001, Morin 1999). Toutes ces raisons amènent les chercheurs en éducation, et plus particulièrement les didacticiens, à interroger en permanence la manière d’appréhender les contextes didactiques et leurs effets sur les apprentissages ; les modes d'interaction entre les participants ou acteurs de ces contextes constituent une de ces manières.
En suivant Goffman, (1973, 23) on peut différencier l’interaction d’une interaction. Goffman définit la première comme « l’influence réciproque que les participants exercent sur leurs actions respectives » et la seconde comme « l’ensemble de [celle-ci] qui se produit en une occasion quelconque quand les membres d’un ensemble donné se trouvent en présence continue les uns des autres ». Cette conception à double face, nous situe dans le champ de l’interactionnisme et plus particulièrement dans celui de la micro-sociologie. Cette définition conserve son actualité parce qu’elle met l’accent à la fois sur les processus de coordination et d’ajustement conjoint autour d’un objet commun (par exemple des savoirs ou savoir-faire) et sur leur inscription dans un temps et un espace donné mais pas forcément très délimité. Et les contextes didactiques déterminent bien une interaction (dans le sens de Goffman) ou un événement communicatif, plus ou moins discursif ou langagier (Kerbrat-Orecchioni, 2005), plus ou moins institutionnalisé, où s’observe de l’interaction. C’est cette relation dialectique entre processus et constituants contextuels de l’interaction didactique que nous souhaitons privilégier pour ce colloque. Parmi ces déterminants, on peut sélectionner la discipline ou l’objet de savoir (langue étrangère ou première, science de la vie et de la terre…), les finalités assignées par une institution ou que les acteurs s’assignent, le nombre de participants, les ressources sémiotiques utilisées, la relation interpersonnelle entre les acteurs… Nous souhaitons également saisir l’occasion de ce colloque pour interroger une seconde articulation : le rapport entre le constituant didactique et le constituant pédagogique, deux faces mutuellement constitutives de l’interaction en contexte éducatif.
Objet du colloque
Si pour les didactiques, la relation entre processus et constituants de l’interaction est unanimement prise en compte, ses modes d’appréhension diffèrent. Le colloque a donc pour ambition d’ : - interroger sur le plan épistémologique et théorique les articulations entre analyse des interactions (notamment du point de vue des sciences du langage) et didactique des disciplines ; - identifier les convergences et les divergences entre les différentes didactiques (sciences, langues…) dans l’approche des interactions ; - informer la communauté éducative sur les recherches les plus récentes dans le domaine des interactions de type didactique ou pédagogique ; - intensifier le tissage de réseaux de chercheurs et identifier de nouvelles perspectives de recherche sur cette problématique. Les axes retenus sont :AXE 1 : Interactions didactiques, disciplines et finalités
1.1 Interactions et savoirs :
les modes de construction, transformation, transmission, mise en circulation des savoirs disciplinaires à travers les interactions ; les modes de médiation d’accès aux savoirs (prescription, étayage, reformulations, régulations diverses, les enjeux cognitifs). Peut-on identifier des manières d’interagir et de communiquer communes aux différents enseignements disciplinaires ? Lesquelles ? A quelles conditions l’interaction permet-elle la circulation et l’appropriation des savoirs ? A travers des dispositifs de travail particuliers (alternance des langues, enseignement à distance…) ?1.2 Les modalités de l’interaction :
la plurisémioticité et la multimodalité des interactions, la circulation oralographique, le rôle des artefacts et des objets de l’interaction, les ressources textuelles ou artefactuelles mobilisées avant, pendant et après la rencontre interactionnelle et leur rôle sur le déroulement interactionnel et l’appropriation.AXE 2 : Propriétés des interactions didactiques en contextes
2.1 L’empan temporel, spatial et participatif de l’interaction :
Comment délimiter l’évènement interactionnel ? Comment prendre en compte ce qui se passe dans l’environnement immédiat de la rencontre (les interactions dans les couloirs de l’école ou les interactions familiales par exemple) ? Quelles unités temporelles et spatiales retenir ?2.2 L’« épaisseur » de l’interaction :
Quelle place réserve-t-on aux affects, aux intentions, aux motifs, aux représentations, aux perceptions, à l’expérience, aux valeurs des interactants, en bref à la dimension plus ou moins observable des processus d’interaction ? Comment appréhender cette dimension de l’interaction et ses liens avec l’enseignement et l’apprentissage et que nous apprend-elle ?2.3 Interactions, culture(s) et acculturation :
Les manières d’agir et d’interagir, les schèmes interprétatifs, observables dans un environnement didactique particulier, s’ancrent dans une culture (qu’elle soit éducative, linguistique, nationale, ou institutionnelle, voire disciplinaire), mais elles sont aussi l’objet d’une acculturation, c’est-à-dire d’une adaptation continue sous l’effet des contacts entre ces différentes cultures ou entre des interactants de culture(s) différente(s). On pourra interroger la relation entre interaction et culture(s) de la classe, de l’école, interaction et culture linguistique…AXE 3 : Interactions et formation des enseignants
3.1 Les interactions comme outil de formation :
Il s’agit de penser le lien réciproque entre analyse des interactions et formation à l’enseignement. Dans quelle mesure les interactions participent-elles à la formation/socialisation des acteurs impliqués dans les situations éducatives (enseignants, apprenants, autres acteurs) et constituent-elles un enjeu pour la formation initiale ou continue ? En quoi et comment les interactions peuvent-elles être investies en formation à l’enseignement ? Quels dispositifs de formation s’appuyant sur l’étude conjointe d’interactions existe-t-il ? L’étude des interactions de type didactique peut-elle être transposable en objet de formation ?3.2 Les interactions comme traces de formation :
En quoi les interactions interrogées dans les récurrences de leur organisation, reflètent-elles (ont-elles à voir avec) des formations professionnelles reçues et/ou des expériences institutionnelles ou culturelles partagées ? En quoi l’étude des interactions (verbales) situées constitue-elle un mode de connaissance de l’agir enseignant ou de l’apprenant, des formes d’actions « historicisées » ou des « gestes professionnels » de l’enseignant ?Comité scientifique
J.-P. Bernié (Université Bordeaux II) – V. Bigot (Université d’Angers) – R. Bouchard (Université Lyon 2) – J.-P. Bronckart (Université de Genève) – C. Buty (INRP) – F. Cicurel (Université Paris-III) – J.-M. Colletta (Université Grenoble 3) – U. Dausendschön-Gay (Université Bielefeld) – J.-M. Debaisieux (Université Nancy 2) – C. Develotte (INRP) – L. Filliettaz (Université de Genève) – L. Gajo (Université de Genève) – P. Griggs (Université Lyon 1-IUFM) – L. Mondada (Université Lyon 2) – E. Mortimer (Université Fédérale du Minas Gerais, Brésil) – N. Muller Mirza (Université de Lausanne) – E. Nonnon (Université d’Artois-IUFM) – L. Nussbaum (Université Autonome de Barcelone) – C. Parpette (Université Lyon 2) – Jean-Charles Pochard (Université Lyon 2) – V. Rivière (Université Lyon 2) – K. Robinault (INRP) – M.-L. Schubauer-Léoni (Université de Genève) – G. Sensevy (Université Rennes 2-IUFM) – A. Tiberghien (CNRS) – V. Traverso (CNRS) – M.-T. Vasseur (Université du Maine).Comité d’organisation
Zeynab Badreddine - Robert Bouchard – Christian Buty – Sophie Dufour - Peter Griggs – Nicolas Guichon – Chantal Parpette – Jean-Charles Pochard – Véronique Rivière – Julie Stauber – Daniel ValeroCoordination : Véronique Rivière